IA et responsabilité :

quels enjeux culturels et sociétaux ?

Par Virgil Benyayer

L’IA, accélérateur… mais à quel prix ?

L’intelligence artificielle promet des gains de productivité vertigineux. Selon BCG, un tiers des entreprises tous secteurs confondus prévoit de consacrer plus de 25 millions de dollars à l’IA en 2025.

Mais cette accélération a un coût. Plusieurs dirigeants et responsables RSE alertent : les IA génératives consomment énormément d’énergie. Comme le souligne une directrice interrogée :

« On explose les compteurs en termes de productivité, mais on passe à côté de nos engagements RSE. »

L’IA force les entreprises à arbitrer entre performance immédiate et responsabilité long terme.

 

Gouvernance éclatée et fantasme d’une IA décisionnaire

Dans certaines structures, l’IA a été déployée dans un climat de désalignement chronique :

  • l’IT teste des outils,

  • les RH s’y opposent,

  • les Comex observent sans trancher.

Loin d’apporter l’agilité espérée, l’IA révèle une gouvernance éclatée où personne ne tient la boussole centrale.

Un cas emblématique illustre ce paradoxe : en 2022, la société chinoise NetDragon Websoft a nommé une IA, Tang Yu, à la tête d’une de ses filiales. Officiellement chargée de rationaliser les processus, cette PDG virtuelle pose une question vertigineuse : gadget marketing ou avant-goût d’un futur possible ?

Ce cas souligne une tension fondamentale : alors que certains fantasment une gouvernance 100 % IA, nombre d’entreprises peinent encore à aligner leurs directions métiers sur une vision commune.

 

Une maturité variable selon les secteurs

L’adoption de l’IA n’est pas uniforme :

  • Retail, banque et tech : vision stratégique, cas d’usage industrialisés, équipes dédiées.

  • Industrie lourde et services publics : adoption plus lente, freinée par des rigidités structurelles, un déficit d’acculturation ou des normes contraignantes.

L’IA n’est pas neutre :

  • elle représente une optimisation opérationnelle pour certains,

  • une transformation culturelle pour d’autres.

Elle doit donc être pensée à l’aune de chaque culture d’entreprise, de chaque modèle économique et du rythme sectoriel propre.

 

L’IA impose une vision du progrès

L’IA ne peut pas être abordée comme un logiciel supplémentaire à implémenter. Elle oblige chaque organisation à clarifier :

  • sa vision du progrès,

  • ses valeurs,

  • et sa cohérence entre discours et actions.

L’enjeu n’est pas uniquement technologique mais sociétal et culturel : l’IA met à l’épreuve la mission même de l’entreprise.

 

Conclusion : entre performance et cohérence

L’intelligence artificielle n’est pas un remède miracle. Elle agit comme un révélateur :

  • de la gouvernance éclatée,

  • des fractures culturelles,

  • et des dilemmes stratégiques entre efficacité immédiate et responsabilité à long terme.

 

Pour tirer parti de l’IA, les entreprises doivent dépasser le fantasme technologique et poser une vision cohérente qui intègre performance, gouvernance et responsabilité sociétale.

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